Délinquance des filles, entre fantasme et réalité

   La publication d'un rapport de l'Institut National des Hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice (INHESJ) et de l'Observatoire National de la Délinquance et des Réformes Pénales (ONDRP) sur la place des mineures dans les mises en cause pour crimes et délits non routiers a fait couler beaucoup d'encre ces dernières semaines. Les rédactions se sont émues de ce qui a été souvent qualifié d'explosion de la délinquance des filles.
    La lecture du rapport lui-même (Repères n° 13, septembre 2010, disponible sur le site de l'INHESJ) et, en particulier, du tableau statistique qui clôt le document se révèle nettement moins spectaculaire. Pour l'ensemble des faits de délinquance d'abord (y compris les escroqueries et infractions économiques et financières), le tableau nous indique que la proportion des filles est passée de 14,2 % de l'ensemble des mineurs mis en cause en 2004 à 15,5 % en 2009. Dans le détail, leur participation aux faits les plus graves est toujours extrêmement faible : 9,9 % pour les vols avec violence (et même, dans cette catégorie, leur part, dans les vols à main armée diminue sensiblement, passant de 4,1 % à 1,4 % sur la même période 2004-2009). Même constat pour les violences à dépositaires de l'autorité, qui sont actuellement sous les feux de l'actualité, et qui restent l'apanage des bandes de jeunes garçons. La part des filles dans ce type de violence passe de 9,7 % en 2004 à 9,6 % en 2009. Autrement dit, elle reste faible en volume et inchangée dans le temps.
En fait, ce sont dans les catégories de délits où la part des filles, quoique toujours nettement inférieure à celle des garçons, était déjà importante que le phénomène de hausse est observable et préoccupant. Pour les chiffres des vols sans violence, par exemple, la part des filles passe de 18,2 % à 22,2 % (dans cette catégorie, le vol à l'étalage présente la hausse la plus spectaculaire, avec une proportion de filles passant de 38,7 % à 45,6 %). Autre chiffre préoccupant, celui des vols violents sans arme contre des femmes sur voie publique ou autres lieux publics. Dans cette catégorie, la part des filles passe de 18,4 % à 24,7 %. Même chose pour les bagarres (« coups et violences non mortels ») où elle passe de 15,9 % à 18,9 %.
    Comme nous l'avons montré à travers l'étude des données chiffrées les plus significatives, ce nouveau rapport ne nous présente pas un tableau bien différent de celui auquel nous étions habitués. Pour des raisons à la fois physiologiques et psychologiques assez évidentes et que nous avons eu l'occasion de développer par ailleurs, la part des filles dans la délinquance était, est et sera toujours très minoritaire. Cela dit, si le physique et le psychique sont des freins naturels, un troisième facteur explicatif de la moindre propension des filles et des femmes à recourir à la violence, fut longtemps l'éducation ou la culture. Aujourd'hui, dans les sociétés occidentales, les filles sont élevées (quand elle le sont) pour devenir des garçons comme les autres... Il serait sans doute intéressant d'étudier l'influence de cette évolution de fond sur le genre de phénomène qui nous préoccupe ici.

Stéphane BLANCHONNET

Article d'abord paru sur a-rebours.fr puis repris sur actionfrancaise.net et dans L'Action Française 2000.


Vos commentaires