Touche pas à mon 11 novembre

A l'occasion du déplacement du Chancelier allemand, Mme Merkel, à Paris, le 28 octobre, l'Elysée a annoncé que « Nicolas Sarkozy souhait[ait], [qu']après la mort du dernier poilu (Lazare Ponticelli, mort à 110 ans, le 12 mars 2008), […] le 11 novembre dev[înt] une journée de réconciliation franco-allemande, pour bâtir un avenir partagé ». Disons-le tout net, un tel souhait, s'il devait entrer dans les faits, serait une catastrophe pour l'identité nationale dont M. Sarkozy nous assure pourtant qu'elle est un de ses soucis majeurs. Précisons que nous ne parlons pas ici sous l'effet d'un vulgaire préjugé anti-sarkozyste. Le sujet est trop grave. En effet, comment peut-on imaginer, – en nous plaçant du point de vue même de l'amitié franco-allemande ! –, que celle-ci puisse se bâtir sur l'effacement d'un souvenir aussi enraciné dans l'âme française que celui de la victoire de 1918 ? Pourquoi prendre le risque de fragiliser un peu plus cette identité nationale en la frappant dans un de ses derniers symboles encore intelligibles au plus grand nombre ? L'engouement des romanciers et des cinéastes pour la Première guerre mondiale, le succès des recueils de lettres de poilus auprès des enfants des écoles, l'émotion nationale ressentie à l'occasion du décès de Lazare Ponticelli, tous ces faits manifestent que le souvenir de la Grande guerre et du sacrifice de millions d'hommes, tués ou blessés, pour la défense de la Patrie, est encore bien vivace. En comparaison, la proposition d'une journée de réconciliation franco-allemande fait figure de gadget sans âme. Il y a fort à parier d'ailleurs que cette idée soit une simple opération de communication visant à faire du bruit autour d'une visite sans enjeu, Madame Merkel, nouvellement ré-investie dans son pays, ne faisant en choisissant Paris comme première destination que rendre à Nicolas Sarkozy sa politesse de 2007. Un simple buzz, pour utiliser un vocable à la mode, aura-t-il raison du 11 novembre ? A l'Action française, nous n'oublierons pas en tout cas le courage de nos anciens qui ont su braver l'occupant en célébrant haut et fort l'anniversaire de la victoire le 11 novembre 1940. Peut-être même pourrions-nous nous inspirer de leur exemple le 11 novembre prochain...

Stéphane BLANCHONNET

Article paru dans L'AF2000 numéro 2781, du 5 au 18 novembre 2009, sous le titre « 11 novembre : touche pas à ma mémoire »


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