Le 18 brumaire de Manuel Valls

Ce qu'a fait Manuel Valls jeudi soir dernier, en arrachant au Conseil d'État, dans des délais littéralement inouïs, une décision qui assassine les "libertés publiques", alors même que nous, acteurs de la "dissidence", étions déjà en train de fêter (en parfaits naïfs !) la décision du tribunal administratif de Nantes et "l'indépendance des juges", cela porte un nom : c'est un coup d'État !

Pas un coup d'État militaire comme le rêve ceux qui méconnaissent le légalisme foncier de l'armée d'aujourd'hui, pas une "marche sur Paris" comme il y eut une "marche sur Rome" et comme le rêve ceux qui confondent manifestation et révolution (la vraie marche de Mussolini ne fut qu'une parade, le pouvoir étant déjà "tombé"), mais un vrai coup d'État, fait depuis le cœur du pouvoir, depuis le cœur des institutions, le type même du coup d'État auquel Maurras accordait le plus de crédit et dont un parfait exemple nous est donné par l'opération Rubicon du 2 décembre 1851.

Manuel Valls, nous rend au moins ce service de nous rappeler la leçon du "Politique d'abord !" de Maurras. Non, nos adversaires ne sont pas seulement des imbéciles, ce sont des imbéciles qui ont le pouvoir ! Ne passons donc pas tout notre temps et notre énergie à le déplorer (comme le fit Hugo dans ses Châtiments), sur les réseaux sociaux ou ailleurs, et à signer des pétitions pour demander l'autorisation de ceci ou (comble de l'inconséquence) l'interdiction de cela. Ne nous faisons pas non plus trop d'illusions sur la possibilité de "renverser" le régime à l'occasion d'une mobilisation, aussi forte soit-elle, des différents mécontents. Notre "conspiration à ciel ouvert" est une œuvre de salut public mais elle doit être lucide pour être efficace. L'effervescence actuelle peut être un moyen puissant d'atteindre des objectifs intermédiaires mais à condition de ne pas la prendre pour une fin !

Stéphane BLANCHONNET

Article d'abord paru sur a-rebours.fr puis repris dans L'AF2000


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