Quelle représentation nationale ?

   Les dernières élections législatives viennent de nous fournir une nouvelle démonstration de la faiblesse du système de représentation parlementaire. D'abord, avec 44% d'abstentionnistes, il est clair que le pays légal ne correspond au mieux qu'à l'opinion de la moitié du pays réel. Ensuite, la conjonction du mode de scrutin et des accords d'appareils (comme celui des Verts et du PS) produit ce résultat paradoxal qu'un pays majoritairement à droite accouche dans les urnes d'une chambre qui donne la majorité absolue au principal parti de gauche et un groupe parlementaire à un mouvement dont la candidate avait péniblement obtenu 2 % des suffrages à l'élection présidentielle ! Enfin, et c'est toute l'actualité du texte de Maurras, composé à l'occasion de la mort d'Augustin Cochin au cours de la Grande guerre, que nous reproduisons ci-dessous, que de montrer que l'idée même de représenter les Français à travers leurs seules opinions, leurs seuls états d'âme du moment, est en elle-même une aberration. Une autre forme de représentation est possible qui correspondrait, sur le modèle du fonctionnement de la France d'Ancien Régime aux intérêts vivants plutôt qu'aux opinions éphémères...

Stéphane BLANCHONNET

Article d'abord publié sur a-rebours.fr puis repris dans L'AF2000

 

   « Augustin Cochin aura appris aux lecteurs de son âge et de son époque l'existence d'un autre mode de représentation, essentiellement français celui-là, qui ne se fonde ni sur les volontés, ni sur les idées, mais qui exprime des « États », nous dirions, somme toute, des intérêts, mais ce mot moderne est moins complet, moins riche, moins généreux et moins fort que l'ancien.

   Le pays députait à son gouvernement non le symbole de ce qu'il pensait dans la nuit dernière, et au dernier vent qui soufflait, mais la figure vivante de son être, de sa situation, de sa position permanente dans l'espace et le temps. Indépendamment des États-généraux, réunis à date inégale, nos États locaux, maîtres d'un grand tiers du royaume, représentaient cela : noblesse, richesse, fondations religieuses, corps, compagnies, confréries, communautés, la terre et l'action de la France, la vie des ordres de la nation.

   Chacun de ces États avait donc des besoins, plutôt que des doctrines, besoins qu'il faisait valoir, d'abord par ses pouvoirs propres, ensuite auprès des Ordres voisins et troisièmement auprès de l’État, gouvernement et Roi. » (Charles MAURRAS, Tombeaux)


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