La famille sacrifiée aux lobbyistes "gays"


    «Quand nous disons "politique d'abord", nous disons : la politique la première, la première dans l'ordre du temps, nullement dans l'ordre de la dignité. Autant dire que la route doit être prise d'abord que d'arriver à son point terminus ; la flèche et l'arc seront saisis avant de toucher la cible ; le moyen d'action précédera le centre de destination.» Ces lignes de Charles Maurras, parues dans L'Action Française du 16 février 1923 puis reprises dans toutes les anthologies maurrassiennes (notamment Mes idées politiques), nous avons l'habitude de les évoquer pour faire comprendre la nécessité et l'urgence de l'action politique à un public conservateur porté à la négliger par inconséquence, dégoût ou mépris. Ces deux derniers motifs, s'ils sont en quelque sorte plus excusables que le premier du fait de la médiocrité du personnel républicain et du caractère artificiel et nuisible du système des partis, nous avons toujours soigneusement évité pour notre part de les invoquer pour déserter l'arène politique, y compris quand elle prend une forme électorale.
    Mais il n'est pas inintéressant de considérer le texte de Maurras sous un autre aspect tout aussi important et tout aussi explicite : l'affirmation de la dignité supérieure des questions sociales et des questions morales, ou "sociétales" pour utiliser l'affreux jargon contemporain, par rapport aux questions strictement politiques, c'est-à-dire, dans l'esprit de Maurras, par rapport à la question de la forme du régime principalement. Autrement dit, la monarchie est "pour" le Bien commun, "en vue" du Bien commun, mais c'est ce dernier, dans ses dimensions diverses, matérielles ou immatérielles, qui fait seul figure de finalité. Notons au passage que c'est ici un des points de divergence essentiels entre le nationalisme intégral et le fascisme. Pour Maurras l’État est toujours un moyen, jamais une fin.
    Cette réflexion sur l'importance des questions morales est aujourd'hui – et il faut le regretter – d'une actualité brûlante. En effet, dans ce domaine, la campagne est l'occasion pour de nombreux candidats, de gauche bien sûr mais parfois aussi de "droite" (avec tous les guillemets qui s'imposent), de pratiquer un clientélisme d'autant plus abject et irresponsable qu'il consiste cette fois à rien moins qu'à sacrifier pour quelques voix une institution plus ancienne et plus fondamentale que l’État lui-même, la famille. Même si d'autres pays d'Europe ont déjà opéré ces dernières années cette révolution littéralement inouïe du "mariage" homosexuel, il n'est pas inutile d'insister un instant sur la rupture anthropologique majeure que cela représente. Pour la première fois dans l'histoire des hommes et cela indépendamment de la tolérance culturelle plus ou moins grande à l'égard du fait homosexuel (cela n'a rien à voir et même la Grèce antique n'a jamais rien connu de semblable), une simple orientation sexuelle (comme par exemple le sado-masochisme ou le fétichisme) va se voir élever au niveau de l'institution qui, sous quelque forme particulière qu'elle ait pu prendre dans les différentes civilisations, a toujours réglé les rapports entre ces deux formes objectives et complémentaires de l'humanité que sont l'homme et la femme, en vue de la perpétuation de l'espèce et de la stabilité de la société.
    Cette satisfaction donnée aux lobbyistes "gays" (qu'il ne faut évidemment pas confondre avec les personnes homosexuelles qui n'ont pas toutes le sentiment d'appartenir à une prétendue "communauté" sous prétexte de la forme particulière de leur libido) aura également pour conséquence de légitimer l'adoption par ces nouvelles "familles", consacrant la réification de l'enfant, devenu un bien, un droit, avant d'être une personne, et qui sera tout à fait légalement privé de père ou de mère selon les cas, privation qui, il est vrai, pouvait déjà exister de façon fortuite... mais était-ce une raison suffisante pour l'institutionnaliser ?
    Une petite visite sur le site Internet de l'association "SOS-homophobie" devrait suffire à nos lecteurs pour se faire une idée de la position des différents candidats sur cette question. Cette association, qui lutte notamment contre la "gayphobie" (sic) et la "biphobie" (re-sic), a en effet posé douze questions aux prétendants à la magistrature suprême. Il ressort de la lecture de ce document que les candidats de gauche (Hollande, Mélanchon, Joly principalement) s'engagent non seulement à légaliser le mariage homosexuel et l'adoption pour les couples homosexuels mais aussi à endoctriner les enfants français dès l'école primaire (mais oui, vous ne rêvez pas !) avec les théories des gender studies et à développer les moyens de lutte contre les discriminations et injures à caractère "homophobe" ou prétendues telles... À droite, Marine Le Pen et Nicolas Sarkozy résistent en revanche à pratiquement toutes les exigences des lobbyistes, sauf sur la détection de l'homophobie dans le cadre familial pour Marine Le Pen et sur ce même point ainsi que sur l'inclusion de l'orientation sexuelle et de l'identité "de genre" (sic) dans les motifs ouvrant droit au statut de réfugié pour Nicolas Sarkozy. De son côté François Bayrou pratique, comme on pouvait s'y attendre, une politique de gribouille consistant à accéder à la moitié des demandes (l'adoption, l'aggravation de la lutte contre la prétendue "homophobie") et à refuser l'autre moitié, en particulier le mariage. Ce dernier point est spécialement révélateur de l'incohérence de ses positions puisque la revendication du mariage a notamment pour but dans l'esprit de ses promoteurs de faciliter... l'adoption ! Les électeurs, catholiques notamment, qui pouvaient être tentés par le vote Bayrou par rejet de Sarkozy ou par crainte de Marine Le Pen apprécieront...

Stéphane BLANCHONNET
 

Article d'abord paru sur a-rebours.fr puis repris dans L'Action Française 2000


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